Dans beaucoup d’entreprises le début d’année est une période propice aux évaluations individuelles dites « annuelles ». Je vous propose quelques réflexions au sujet de cet incontournable entretien d’évaluation annuel.
Tout d’abord, un Quizz en forme d’auto-évaluation
Vous êtes évalué ou, tour à tour, évalué et évaluateur. Dans chacun de ces « rôles », comment vivez-vous l’exercice ? (cochez la ou le cases correspondant à votre perception)
Lorsque vous participez à l’exercice en tant qu’évalué et en tant qu’évaluateur, avez-vous coché les mêmes cases ? Tiens, tiens…si ce n’était pas le cas (ce n’est pas le mien !), peut-être est-il bon, dans la posture de manager, de se souvenir de ses attentes en tant que managé ?
Retour sur l’essentiel : à quoi sert un entretien d’évaluation ?
Le législateur vient d’introduire l’obligation, tous les deux ans, d’un entretien professionnel aux contours bien définis ; ce qui a le mérite, de facto, de recadrer les objectifs de l’entretien d’évaluation annuel. L’entretien professionnel est centré sur la personne et ses perspectives d’évolution à moyen terme. L’entretien d’évaluation a trait au travail actuellement confié au collaborateur et aux objectifs opérationnels liés à sa fonction à court terme.
Pour autant, le législateur a répondu, pour l’entretien annuel, en creux par rapport à l’entretien professionnel, à la question du QUOI ? L’entretien d’évaluation est clairement une pratique managériale concernant l’appréciation des résultats obtenus, la fixation des objectifs et les moyens à mettre en œuvre pour faciliter l’atteinte des objectifs.
L’on voit bien poindre la réponse au « POURQUOI » dans les attendus de l’entretien professionnel : assurer dans le temps l’employabilité des salariés. Pour ce qui est de l’entretien d’évaluation, les choses sont moins nettes : assurer les résultats économiques attendus très certainement, au-delà ?
Reste la question du « POUR QUOI ? ». Elle renvoie à la finalité de la fonction managériale et donc à la conception que chacun peut avoir de son rôle de manager : de détenteur du pouvoir à développeur des potentiels (de l’autorité qualifiée d’autorité « coup de bâton » à l’autorité qui « grandit l’autre » pour reprendre les termes de Michel Serres). Cela interroge aussi l’ordre dans lequel le manager place les priorités entre ses missions humaines et ses missions économiques. De la conception de son rôle de manager découle « sa » manière de concevoir et dérouler l’entretien d’évaluation.
A chacun donc, à partir de sa conception du rôle de manager, de répondre à la question du « POUR QUOI ? » des entretiens d’évaluation et de « dérouler » l’entretien d’évaluation de telle manière qu’il serve ses objectifs. Je ne peux personnellement que parler d’entretiens d’évaluation menés pour servir en premier lieu l’homme (ou la femme, bien sûr). Et comme les résultats économiques ont effectivement suivi, je n’ai pas eu à modifier mon approche.
« Mes » leçons de l’expérience
Pour ma part, si en tant que managé, j’éprouvais plutôt de la curiosité sans attendre grand ‘chose de l’évaluation, en tant que manager, c’était pour moi un temps fort que j’appréciais. Pourquoi ?
- Parce que, lors d’une prise de fonction, il est de la première importance de s’intéresser réellement à chacun de ses collaborateurs : quels sont ses points forts ? ses centres d’intérêt ? son appréciation de la situation ? ses souhaits et envies ?
- Parce que, après deux évaluations, nous passions allégrement sur la rubrique « points forts, points faibles ». A quoi bon y passer du temps ? On ne fera pas d’un faible en thème un fort en thème et il ne sert qu’à démotiver et faire perdre la confiance en soi de rappeler en permanence les points faibles. La question utile est celle de l’organisation. Comment s’organiser pour que le collaborateur ait l’occasion de solliciter ses points forts et, dans la mesure du possible, n’ait pas trop à solliciter ses points faibles.
- Parce que m’importait la perception que chacun avait de la manière dont il pensait contribuer à l’atteinte de nos objectifs d’équipe, objectifs compris comme un pas de plus vers la vision qui nous animait – ce que nous souhaitions que l’on dise de notre équipe. Les objectifs quantitatifs, certes très présents, n’étaient qu’une conséquence des actions que la volonté de progression vers notre vision allait générer.
- Parce que, au travers de leurs réactions, je trouvais matière, moi aussi, à améliorer ma pratique managériale. Je regrette juste de ne pas avoir posé ouvertement la question comme le fait Michèle Leroy, fondatrice et dirigeante d’Id’Quation :« Qu’est-ce qui vous convient ? Que voudriez-vous voir amélioré ? ». Je n’y avais pas pensé…
- Parce que, le problème de la rémunération était totalement dissocié de cet entretien, ce qui coupait court à toute « pollution » de l’entretien d’évaluation.
- Et peut-être aussi parce que … je me faisais confiance, je faisais confiance et j’aimais mon job de manager développeur de talents ! Cette composante ne trompe pas les collaborateurs…
Pour conclure :
Dans ma pratique de conseil en management, j’ai souvent demandé à consulter un échantillon de feuille d’entretien d’évaluation remplies. C’est une mine d’informations :
- Sur la culture et les valeurs de l’entreprise (comme elles se manifestent dans la vraie vie de tous les jours, pas comme elles sont répertoriées » dans une éventuelle charte d’entreprise !)
- Sur la maturité et la compétence managériale des managers. Autrement dit, c’est un excellent outil pour évaluer la qualité managériale des évaluateurs.
Car lors d’un entretien d’évaluation, il y a deux acteurs : l’évalué et l’évaluateur et le résultat tient aux deux acteurs : l’arroseur peut se retrouver arrosé…