J’ai passé une heure et demie avec un Socrate des temps modernes, un « accoucheur » de l’esprit.
Pour avoir participé à un des ateliers philosophiques de Jérôme Lecoq , j’ai eu envie d’aller plus loin et de me lancer dans une séance individuelle pour « faire le tour du propriétaire », comprendre mon mode de fonctionnement intellectuel et relationnel, sous la conduite de Jérôme. Je n’ai pas été déçue !
Comment se déroule ce coaching philosophique ?
Vous apportez juste une question qui n’a pour rôle que de servir de support au déroulement de la pensée. Il n’est aucunement question de parler de soi, de sa situation personnelle, de ses états d’âme. Il s’agit juste de préciser sa pensée en répondant aux questions posées. Et pourtant, vous terminez la séance avec un diagnostic personnel aussi limpide que sans appel !
« Intellectuellement », la démarche tient ses promesses :
Il s’agit d’une mise à l’épreuve de ses idées sans concession.
Un travail de sculpteur : ôter tout le superflu pour en venir à l’essentiel.
Pas question de souffrir les moindres digressions ou échappatoires (d’aucuns diraient « tout enfumage »)
- Jérôme : L’inconnu, ça vous fait peur ou ça vous met en joie ?
- Monique : D’une manière générale, j’aime bien le changement, mais concrètement, je….
- Jérôme :Je ne vous parle pas de changement, je vous parle d’inconnu. Vous aimez ou pas ?
Il ne me lâchera pas !
Terriblement exigeant mais aussi terriblement efficace pour aller à l’essentiel. J’en avais déjà fait l’expérience lors d’un stage d’une semaine dans le désert avec des art-thérapeutes et des touaregs. Lorsqu’il nous avait été demandé le dernier jour de dire en une phrase, deux au maximum, ce que nous retenions de ces 8 jours.
Hors de question de débattre.
Pas question d’expliquer pour justifier ce que vous avez dit (« dit, c’est dit » !), pas question de se raconter comme chez un psy, il s’agit juste (doux euphémisme) d’une mise à l’épreuve intellectuelle. Il est question d’apprendre à penser et le chemin est rude car que de nœuds s’est-on fait dans le cerveau !
L’on va aussi « piéger » quelques présupposés
Chaque affirmation repose bien, souvent sur des croyances, plus ou moins fondées, dont on n’a aucune conscience et ces présupposés, allant pourtant tellement de soi à nos yeux, vont être mis à mal. Pourtant, à première vue, il s’agissait juste de répondre à la question que votre imprudent/innocent mot prononcé a suscitée. Rigueur et authenticité exigées.
- Jérôme : Qu”est qui pose problème à toujours avancer. C”est quoi le problème ?
- Monique : La fatigue
- Jérôme : Oui effectivement. Vous êtes fatiguée ?
- Monique : Non
- Jérôme : Alors ce n’est pas ça le problème ; c’est quoi le problème de tout le temps vouloir avancer ?
- Monique : Silence
- Jérôme : Vous voyez le problème ?
- Monique : Non, je ne le vois pas. Mais je reconnais que j’ai toujours fonctionné comme ça, je
- Jérôme : Ce n’est pas ce que je vous demande. C’est quoi le problème ?
Retour à la case départ !
La démarche ne pardonne pas ! J’avais rarement expérimenté à ce point le bien-fondé de la remarque d’Antoine de Saint-Exupéry : « La perfection est atteinte, non pas lorsqu’il n’y a plus rien à ajouter, mais lorsqu’il n’y a plus rien à retirer.»
Nous sommes loin des cours de philo
Nous sommes loin des écrits philosophiques auxquels, je l’avoue, je ne comprends pas souvent grand’chose : cela fait trop mal à la tête comme disent mes petites filles franco-thaïes. Et voilà que, tout à coup, les pensées philosophiques deviennent accessibles !
Exemple :
Je me suis, à un moment, trouvée face à mes contradictions : au moment même où j'affirme une de mes vérités, mon comportement est en totale contradiction avec cette affirmation. Quand Jérôme me le fait remarquer avec ses mots, je comprends (trop bien...) ce dont il s'agit.
Quand il ajoute que les philosophes nomment cet état de fait « une contradiction performative », j'ai appris un « gros mot » de plus. Là où cela se gâtera, c'est lorsque je voudrais en savoir plus (merci Google) sur cette fichue « contradiction performative ». Car là, plus rien ne va : je n'y comprends plus rien !
Forcément, moi, j'appelle ça « se faire prendre la main dans le sac ». La marche est trop haute, il me faut un coach philosophe pour traduire la noble parole philosophique en des termes accessibles pour moi !
Le plus surprenant reste tout de même à venir : sans rien avoir dévoilé de votre vie, de votre passé, de vos errements, de vos affects, de votre bien ou mal-être, vous repartez avec une vision beaucoup plus claire de vous-même.
Un sérieux pas de fait vers le fameux « connais-toi toi-même » prôné par Socrate
Comment s’est-il imposé ?
Je suis loin d’avoir tout compris, certainement. J’y ai toutefois vu deux « modes opératoires ». Probablement ne s’agit-il que de la partie émergée de l’iceberg, mais comme ils me paraissent utiles et accessibles à tout un chacun, je les partage.
1er mode opératoire : Une exigence de présence et d’attention :
Jérôme : « Monique, je vous perds. Vous êtes avec moi, là ? »
Monique : Non, je réfléchis. Ce n’est pas spontané comme réponse, comme toute question qui dérange
Jérôme : Essayez de sortir un peu de vous-même. Je vous demande de faire une expérience de pensée. D”un point de vue logique, est ce que vous êtes d’accord que quelqu’un qui est tout le temps en train d’avancer, il va avoir du mal à voir ce qui est juste à côté de lui, ce qui l’entoure.
Monique : silence
Jérôme : On est d’accord ?
et me voilà sommée de répondre sans me mettre à dialoguer avec moi-même, ce qui, à l’évidence, est plus confortable que de dialoguer avec un philosophe ! Surtout lorsque la réponse va tellement de soi qu’il n’est pas question de nier ce qu’elle révèle d’inconfortable pour vous ou qu’elle met au grand jour vos incohérences
Entre gymnastique du corps, même s’il s’agit du stretching, et gymnastique de l’esprit, la seconde est, pour moi, terriblement plus éprouvante !
2d mode opératoire : une technique de décentrage
L’objectif, au travers de cette technique de décentrage, est de conduire la personne à se distancier par la raison, et l’amener de la sorte à plus de clarté dans sa pensée,
Jérôme : si vous allez au marché, que vous croisez une personne et que vous lui demandez [reprise de votre question initiale], qu’est-ce qu’il va vous répondre ?
Et la réponse devient évidente ! Adopter le point de vue « du tiers commun », de « l’homme de la rue » et non plus le vôtre, vous amène à formuler vous-même à haute et intelligible voix, très spontanément, ce que vous ne pouviez/vouliez entendre ! «
Une technique de « ouf » diraient certains. Et tout cela dans une atmosphère bienveillante que rien ne vient altérer.
Vous voulez en savoir plus ? expérimenter peut-être ?
- Pour visionner des vidéos d’atelier philosophiques « à la mode Jérôme Lecoq » ? Allez sur son blog ou sa chaîne Youtube.
Bon voyage intérieur !